L'énergie
éolienne pour un développement durable
Christine
Comeau
Yves Gagnon, Chaire
K.-C.-Irving en développement durable
Université de Moncton
juin 2007
e
21e siècle reconnaît sans contredit l'urgence de développer
davantage le domaine des énergies renouvelables et propres. En
effet, les organismes environnementaux et les gouvernements du monde
entier sont rendus à la constatation que les sources d'énergie
traditionnelles ont les désavantages d'être épuisables ou encore
d'être très polluantes et même, dans bien des cas, les deux à la
fois.
Heureusement, la problématique est de
plus en plus prise en considération et l'énergie éolienne est un
excellent exemple d'innovation en matière d'approvisionnement en
énergie pour de nombreux pays. Selon les données de 2006 du
Global Wind Energy Council, la puissance installée des parcs éoliens
atteint un total de 74 221 mégawatts (MW) à l'échelle mondiale.
À titre de comparaison, la puissance installée en génération
d'électricité au Nouveau-Brunswick est d'un peu moins de 4 000 MW,
toutes sources confondues (nucléaire, hydroélectrique, charbon,
pétrole, Orimulsion, diesel). C'est donc dire que dans le
monde, il y a près de 20 fois plus de parcs éoliens pour produire de
l'électricité que toutes les centrales électriques du
Nouveau-Brunswick réunies.
En bref, l'énergie éolienne, c'est
l'énergie cinétique puisée des vents et convertie en énergie
électrique. Elle représente une énergie verte puisqu'elle est
à la fois renouvelable et non polluante. Le Canada possède un
important gisement éolien, mais a tardé à faire le virage vers la
production d'énergie électrique de source éolienne.
Actuellement, selon l'Association de l'énergie éolienne du Canada,
la puissance installée des éoliennes au Canada totalise 1 492 MW (avril
2007), ce qui représente environ 0.5 % de la demande totale en
énergie électrique du pays. Or, par les expériences des
autres pays et en tenant compte des cartes de la ressource éolienne,
le Canada pourrait avoir jusqu'à 20 % de la puissance totale de
génération d'électricité satisfaite par l'énergie éolienne, ce
qui représenterait environ une puissance totale de 50 000 MW par des
parcs éoliens.

Parc éolien Pamplune, Espagne
(photo : Yves Gagnon)
L'Ontario (415 MW), l'Alberta (385 MW)
et le Québec (322 MW) sont les provinces canadiennes les plus
avancées en termes de puissance installée d'énergie éolienne.
Leurs prévisions de croissance sont par ailleurs phénoménales; à
titre d'exemple, d'ici dix ans, la puissance des parcs éoliens au
Québec sera plus grande que toutes les centrales électriques du
Nouveau-Brunswick mises ensemble, toutes sources confondues.
Mais toutes proportions gardées,
l'Île-du-Prince-Edouard est la province canadienne la plus avancée
en matière d'énergie éolienne. Avec ses 34 MW de puissance
installée, l'IPE répond à environ 15 % de sa demande électrique
totale grâce aux éoliennes, ce qui est nettement supérieur au
rendement actuel des autres provinces canadiennes.
L'Île-du-Prince-Édouard accueille aussi l'Institut de l'énergie
éolienne du Canada, dont le mandat est de soutenir le développement
de l'énergie éolienne au Canada et de développer des produits et
services reliés à l'énergie éolienne pour les marchés canadiens
et d'exportation. Cela dit, la majorité des provinces et territoires
canadiens se sont fixé des objectifs de génération d'électricité
par l'énergie éolienne pour les prochaines années.
C'est le cas notamment du
Nouveau-Brunswick qui ne compte actuellement aucun parc éolien; ce
qui changera incessamment puisque le gouvernement provincial et
Énergie NB viennent d'annoncer l'installation de deux parcs éoliens
d'une puissance totale de 95 MW d'ici 2009 et, cela n'est qu'un
début. Le gouvernement néo-brunswickois entend avoir 400 MW
d'électricité grâce à l'énergie éolienne, et ce le plus
rapidement possible. Une telle production représenterait
environ 10 % de la puissance électrique totale au Nouveau-Brunswick.

North Cape,
Île-du-Prince-Édouard
(photo : PEI Energy Corporation)
La chaire K.-C.-Irving en
développement durable de l'Université de Moncton s'est avérée une
alliée de premier ordre dans l'élaboration d'un plan d'énergie
éolienne au Nouveau-Brunswick et dans la région. Avec le
professeur-chercheur Yves Gagnon comme titulaire, cette chaire a
développé les cartes de la ressource éolienne du Nouveau-Brunswick
et de l'Île-du-Prince-Édouard et, elle travaille actuellement à
produire les cartes de la ressource éolienne de la Nouvelle-Écosse,
tout en travaillant sur la deuxième génération des cartes du
Nouveau-Brunswick. La chaire oeuvre aussi au niveau de la
définition de politiques publiques et est régulièrement sollicitée
dans la région en ce qui concerne le développement de l'énergie
éolienne.
L'énergie éolienne a énormément
d'avantages. C'est un domaine qui est rentable et pour lequel
les développements technologiques sont rapides. Les coûts de
production sont très prévisibles et ceux-ci se stabilisent à long
terme. En plus de produire de l'électricité, l'énergie
éolienne offre des opportunités de développement économique en ce
qui a trait à la fabrication des turbines, en plus de l'installation
et de l'opération des parcs éoliens. Les municipalités
peuvent aussi en retirer un revenu grâce à la taxation foncière,
tandis que les propriétaires qui font la location de leurs terrains
aux fins de l'énergie éolienne en tirent eux aussi profit. À
un autre niveau, l'énergie éolienne peut être développée par des
entrepreneurs, municipalités, coopératives et groupes communautaires
de la région. Plusieurs exemples en ce sens existent au
Nouveau-Brunswick, dont à la municipalité de Bouctouche et à la
Coopérative d'énergie renouvelable de Lamèque.
Face à l'environnement, l'énergie
éolienne est exemplaire. Elle ne nécessite aucun carburant,
n'émet aucun gaz à effet de serre, ne pollue ni l'air ni l'eau, ne
détruit pratiquement aucun habitat et ne produit aucun déchet solide,
toxique ou nucléaire. De plus, les turbines peuvent facilement
être retirées d'un terrain si le besoin se présente et elles
utilisent des matériaux recyclables.

Turbines éoliennes Matane
(photo : Yves Gagnon)
Évidemment, il existe certains
désavantages à l'énergie éolienne, mais ceux-ci sont nettement
supplantés par les nombreux avantages que nous venons d'énumérer.
Notons d'abord l'intermittence des vents, qui est toutefois
contrôlable grâce aux prévisions météorologiques qui peuvent
fournir des données assez précises des prédictions de vent 72
heures à l'avance. Par ailleurs, malgré les perceptions, une
turbine éolienne tue moins d'oiseaux annuellement qu'une voiture,
qu'un édifice avec beaucoup de fenêtres, ou même qu'un chat; en
fait, les oiseaux contournent les turbines, tandis que les tours
tubulaires n'offrent pas d'endroits ou les oiseaux pourraient nicher.
Comme toute infrastructure majeure, les parcs éoliens ne doivent
toutefois pas être installés dans les corridors de vol des oiseaux
migrateurs. Le bruit et l'esthétique font également partie des
inquiétudes les plus souvent soulevées concernant l'énergie
éolienne, mais il faut savoir que la technologie avancée en design
de turbine tend à éliminer les bruits causés par celles-ci, et les
parcs éoliens doivent être installés à des distances appropriées
de toute habitation. Pour ce qui est de l'esthétique, les parcs
éoliens doivent être installés en considération du paysage.
Propre, infiniment renouvelable,
économiquement viable et techniquement fiable, l'énergie éolienne
est certainement une énergie sur laquelle nous devons miser dans le
temps présent et pour l'avenir de notre planète.